mardi 28 juillet 2015

Pet-en-l'air en toile imprimée

J'avais dans mes cartons un très vieux projet de pet-en-l'air dans une toile de coton imprimée achetée il y a longtemps. Il a attendu longtemps parce que je voulais me refaire un corps baleiné que l'on aperçoit un peu sur cette photo de premier essai.
I had in my boxes a very old project of pet-en l'ai in a printed cotton fabric bought long ago. I waited a long time to finish it because I wanted to remake me stays (you could see it on this picture).


Comme la jupe était faite depuis très longtemps, j'ai décidé de faire tout le corsage à la main, selon les techniques de montage XVIIIe. J'avais un peu de mal à saisir comment étaient cousu les revers sur le devant mais grâce à l'aide d'Evelyne Bouchard, ça c'est éclaircit.
As the skirt was made for a long time, I decided to sew the bodice by hand, according to 18th century techniques. I had a little trouble to understand how the robings were sewn, but with the help of Evelyne Bouchard, that became clair.


Le haut des plis plats. Le montage des manches est également fait selon la technique du XVIIIe. Katherine et Lauren vous l'explique en anglais ici et .
Top back of the dress. I setted the sleeves in the 18th century way, as explained by Katherine and Lauren.


Une photo du côté avec la couture de côté et l'ouverture pour glisser la main pour accéder aux poches. Je n'ai pas pris de photo de l'intérieur parce que c'était vraiment trop moche!


Le pet-en-l'air est fermé par un long ruban passé dans des portes d'agrafes. Ca masque parfaitement mon corps baleiné, qui est de toute façon dans le même tissu que la tenue.
The pet-en-l'air is closed by a long ribbon on the front. It perfectly hides my stays, which  anyway is in the same fabric as the dress.

J'ai réalisé la tenue pour l'animation de Champs sur Marne le 19 juillet dernier. J’interprétais une marchande de fard en 1780. Ma tenue se voulait un peu démodée mais malgré tout coquette. Je l'ai porté avec une chemise, un fichu en dentelle (1900 en fait), des mitaines en filet (qui doivent être mi XIXe) et un bonnet rond dit parfois à la laitière retenu par un ruban. Le bonnet est en organza de soie, entièrement cousu à la main, avec des ourlets roulés. Seuls bijoux: une paire d'anneaux plaqués or (ça sert également de capital à l'époque!).
I sew it for the animation at Champs sur Marne on the last July, 19th . I interpreted a seller of rouge in 1780. Clothing was intended as a bit dated but still elegant. I wore a shirft with a lace kerchief (1900 actually), net mittens (which should be from the mid 19th) and a round cap sometimes said "à la laitière" held by a ribbon. The bonnet is made of silk organza, entirely hand sewn with rolled hems. Only jewelery: a pair of gold-plated rings.


Quelques photos, some pictures:




Le jeu des Grâces, Graces game



La photo bêtisier:
"Les insectes sont nos amis, il faut les aimer aussi..."


Merci à Luc Morel, Alain Warnier, Serge Guerin et Cristoph pour les photos!





mardi 21 juillet 2015

Le gras, c'est la vie!

A l'occasion de l'animation que la Compagnie de l'Histoire et des Arts faisait dimanche dernier au château de Camps-sur-Marne, et pour laquelle j'incarnais une marchande de fards; j'ai réalisé non seulement des fards selon des recettes de l'époque, mais également des pommades et de la poudre. Nous avions parmi nous quelques cobayes à cheveux longs ou mi-longs, aussi bien femmes qu'hommes, qui ont bien voulu se prêter au jeu des tests grandeur nature.
 
 
Après avoir bien pommadé chaque mèche, j'ai appliqué de la poudre parfumée au pinceau, également mèche à mèche puis j'ai peigné pour que la poudre soit bien étalée et enrobe bien chaque cheveux. J'avais réalisé différents parfums à la fois pour la pommade et la poudre, d'après les goûts de l'époque: épices, lavande, fleurs d'oranger et jasmin. C'est la lavande qui a remporté tous les suffrages!
 
 
 
 
Les cobayes ayant joué le jeu de ne pas se laver les cheveux, le temps de pommadage a été relativement court par rapport à celui du poudrage, qui a nécessité presque 250gr de poudre par tête à cheveux très longs.

 
Ici on voit bien le côté gras et le côté aérien avec la poudre.
 



Voici le résultat de dos (malheureusement, nous n'avons pas pensé à prendre une photo de face et la demoiselle a porté un chapeau toute la journée), coiffure réalisée par Decorum et Bagatelle.
 
Et pour finir une jolie photo de deux de nos non moins jolis cobayes: la première a les cheveux très brun (et a été coiffée par Emmanuel Courrau), la seconde qui a servi pour les photos est plutôt châtain.
 
 
Elles ne sont pas belles? Merci les filles!
 
On s'y croirait, non?
Sir Joshua Reynolds, The Ladies Waldegrave, 1780
 
 

 

mardi 14 juillet 2015

Tests comparatif des rouges

J'ai décidé de comparer les différentes matières colorantes de rouge selon chaque type de recette du XVIIIe.

La recette ici retenue est le rouge dit Turc, qui est liquide. C'est une recette que l'on trouve chez de nombreux auteurs, avec très peu de différences: Nicolas de Blégny Secrets concernant la beauté et la santé. Tome premier Paris : Laurent d'Houry et Veuve de Denis Nion, 16889-89, Pierre Buc'hoz, La Toilette de Flore, Paris: 1771, etc.

 Voici ce que j'en ai conclu:

10gr. de Rouge  Rouge Turc   
Ingrédients
%
gr
Phase Aqueuse
     - Bois du Brésil en poudre
5,5
0,55
     - Vinaigre blanc
88,7
8,87
     - Eau de  rose avec gomme d'adragante
5,4
0,54
Ajouts
     - Alun
0,4
0,04



Faire bouillir à petit feu rouge+vinaigre pour réduire de deux tiers. Filtrer.

Ajouter l’alun et l’eau de rose avec la gomme adragante.


Buch'oz indiquant que l'on peut remplacer le Bois du Brésil par de la cochenille ou du bois de santal rouge, j'ai eu envie de tester avec ces ingrédients mais également d'autres, utilisés soit plus tard, soit par d'autres pays (coquelicot, hibiscus) et surtout avec la star des colorants cosmétiques rouge du XVIIIe siècle, l'orcanette.



Test sur le bras et le papier:
1. Bois de santal: Je n'ai pas pu filtrer ma version au bois de Santal cr je l'ai trop réduite et étant devenue pâteuse, elle ne passait plus à travers le filtre! Le résultat est du coup un peu faussé.
2. Bois du Brésil: c'est l'ingrédient originel. Très foncé, il semble avoir éclaircit. Peut-être à diluer?
3. Cochenille: merveilleuse couleur dans le flacon rouge mais vire au brun sur mon bras et carrément au noir sur le papier! Portant, c'est ce qui reste le plus longtemps, même après avoir rincé, j'ai encore la trace rouge-brune!
4. Orcanette: très peu coloré, tirant au brun. La mixture a produit des mucilages (en même temps, c'est une plante!).
5. Coquelicot: Très beau rouge, semble virer au brun à cause de l'alun Très jolie couleur dans le pot et sur ma peau mais ne reste pas.  Vire au bleu-gris sur le papier. A également produit des mucilages.
6. Hibiscus: Le plus rose et très jolie couleur (sur mon bras, même remarque que le coquelicot), vire petit à petit au bleu sur le papier.




J'ai également fait d'autres tests  à l'échelle échantillon des différents types  de recette de rouge (seule me manque la recette au raisin, mais ce n'est pas encore de saison!). Vous verrez les résultats à Champs-sur-Marne dimanche si vous êtes présents.
Je posterai peut-être des photos s'il m'en reste.

Mes conclusions sur les tests de recette de rouge (gras, liquide et poudre):


Ce que j'ai appris sur les rouges avec ces expériences, c'est qu'en général, un rouge gras ne teinte pas ou très peu. Pour avoir un rouge tenace, il faut qu'ils soit astringents, à base de vinaigre ou d'alcool. Les recettes de rouges indiquées dans les manuels d'époque sont d'ailleurs souvent liquide, il y a toutefois une recette de rouge gras liquide mais je ne suis pas en mesure de la tester car il faut faire macérer les pigments dans une pâte d'amande broyée puis en extraire l'huile par pression à froid.
On en trouve également en poudre, chez Auguste Caron (à base de cochenille et talc, à différentes proportions pour obtenir différents tons).
Les recettes de rouges gras (qui finalement sont peu présents dans les manuels) sont en fait des recettes de pommade pour les lèvres (gercées ou pas) à laquelle on donne une jolie teinte rose/rouge avec de l'orcanette.

lundi 13 juillet 2015

Les ingrédients des fards: les rouges

Avant de me pencher sur des tests de recette de rouge, je voudrais revenir sur les matières colorantes rouges qui étaient utilisées et celles que j'ai ajoutées à mes tests:


 Les attestés:

1. Bois de santal rouge:  C'est un bois que l'on trouve en Inde, au Népal, en Australie. . réduit en poudre, il est rouge orangée et sent très bon (il peut servir d'encens).

2. Bois du Brésil: Il est également appelée Pernambouc. Protégé, il est difficile à trouvé (mais ça ne veut pas dire que c'est interdit, c'est juste contrôlé par le CITES). Le mien est très foncé, presque noir.
Il est également utilisé comme plante tinctoriale textile.


3. Cochenille: L’acide carminique (C22H20O13) est un éther de couleur rouge présent naturellement chez la cochenille. Cet insecte parasite produit l'acide pour se protéger des prédateurs. L'acide carminique est l'agent colorant du carmin.Le carmin peut être à ce titre synthétique ou naturel (par les cochenilles séchées et réduites en poudre). C'est le moment polémique du billet! Le carmin est interdit aux Etats Unis dans l'alimentation au titre qu'il augmenterait le risque d'hyper-activité chez les enfants.  Il n'est pas interdit en Europe, mais reste à savoir si on utilise la version synthétique (pour les cosmétiques) ou la version bestioles parasites écrasées (pour l'industrie alimentaire) ... Berk!

Pour ma part, j'ai fait la version trash: j'a acheté des cochenilles entières sèches. Ca m'a dégoûtée au début puis je m'y suis faite. Je voulais juste faire des tests de couleurs, je ne les utiliseraient pas pour des fards "utilitaires". Surtout que la cochenille aurait un potentiel allergisant.


4. Orcanette: J'ai longtemps fait des recherches parce qu'il semble qu'il y a des confusions, même à l'époque. Les auteurs parlent parfois de buglosse ou anchusa. Bref, la taxinomie des plantes, toute une histoire! ;-) Il s'agit bien de l'orcanette des teinturiers. Ce qui me chiffonnait c'est qu'elle est très utilisée au XVIIIe et encore aujourd'hui dans les baumes à lèvres bio aux Etats Unis alors qu'elle fait partie de la liste II de la pharmacopée française. C'est à dire qu'en ingestion, les effets secondaires sont plus importants que les bienfaits. Après avoir réfléchis longtemps, je me suis dit que que j'allais quand même la tester et que les doses ingérées via la pommade à lèvres seront plus que minimes (parce que non seulement je filtre mais en plus, ça n'est pas pire que les colorants chimiques des rouges à lèvres modernes!).

Les supposés:

5. Coquelicot: Il est utilisé dans le aker-fassi avec parfois de la grenade. C'est un rouge portée par les femmes berbères. Il a l'avantage de teindre les lèvres et de les adoucir. Par contre, la couleur rouge ne migre pas dans les substances grasses. Ou alors il faudra le rajouter en poudre à votre baume, sans le filtrer.


6. Hibiscus: cette jolie plante à fleurs rouges, rose ou bleues, a des vertus médicinales, cosmétiques et culinaires. Elle sert aussi bien à faire de bonnes infusions, le bissap. Comme le coquelicot, elle n'aime pas trop l'huile.

7. L'oxyde rouge: il est contenu dans l'ocre rouge, un des premiers "fards" utilisés (on en a retrouvé dans des tombes néolithiques). Très colorant mais contrairement à ces confrères cités plus haut, il colorie dans la masse, sans laisser de transparence (ça peut être un atout)  et il est du côté des orangés, tandis que les autres tirent vers le rose, le pourpre.

Comment préparer ses cheveux à la coiffure XVIIIe.

English speakers: a post only in French today to explain how to prepare your hair to be style in the 18th century way. It's works also for wigs. 
This this the same way explained by LBCC Historical in her video in the bottom post.


En écho à la journée 1780 au château de Champs-sur-Marne, pour laquelle je serai une marchande de fards, je voulais vous montrer comment préparer ses cheveux à faire une coiffure XVIIIe à la façon de l'époque, parce que franchement, ça change tout!
Et la bonne nouvelle, c'est que ça marche aussi sur les perruques!

Finis les cheveux lisses, qui glissent, brillants et pas assez volumineux, voici la méthode qui va vous permettre d'avoir une super coiffure XVIIIe.
Quelque part, je trouve ça aussi important que le corps baleiné sous une robe.

1.Les ingrédients:

Pour cela, vous aurez besoin d'une pommade, faite à base d'huile et de cire. Le mieux est d'utiliser du saindoux, comme à l'époque. On en trouve encore dans les bonnes charcuteries, voire certaines grandes surfaces.
Pour 100gr: 90.8gr de saindoux, 22.5gr de cire blanche et 0.5gr de Vitamine E (pour éviter le rancissement mais pas obligatoire). Le tout se fait fondre au bain-marie. On peut ajouter une dizaine de gouttes d'huile essentielle pour parfumer (lavande, orange, citron et plus chères rose ou fleurs d'oranger). Vous pouvez remplacer le saindoux par une huile (olive, noisette, sésame éventuellement) mais il faudra mettre un peu plus de cire (pas beaucoup) ou de l'huile de noix de coco (qui est solide en dessous-de 25°C).

L'amidon: il peut être de maïs ou de blé. J'en ai trouvé sur commande en pharmacie (1kg). C'est celui de blé qui est le plus adapté je trouve.

Attention: si vous avez ajouté des huiles essentielles, faites un test (pli du coude, creux du poignet) 48h à l'avance pour être certain que vous n'aurez pas de réaction allergique!
 
2.Le matériel:
Vos mains, un gros pinceau, un peigne assez fin et une brosse en sanglier.


3.La procédure:


La pommade:
Sur vos vrais cheveux, plus vous aurez les cheveux gras, mieux ça sera car ça écourtera la phase pommadage.  Brossez bien dans tous les sens avec la brosse en poils de sanglier pour étaler le sébum, plus avec le peigne, d'abord les grandes dents puis les petites. Toujours dans une optique d'étalement du sébum. Il doit bien recouvrir tous les cheveux.
Sur une perruque ou si vos cheveux ne sont pas assez gras: prenez une noisette de pommade dans vos paumes que vous chauffez pour qu'elle devienne presque liquide, étaler mèche à mèche (environ 5cm). Bien enduire la mèche avec les doigts et au peigne. Attention à ne pas en mettre trop, c'est un coup de main à prendre! Procédez pour toute la chevelure en finissant de bien peignez partout pour égaliser.

Voici le résultat obtenu sur une perruque châtain clair/blond foncé:


Vous voyez, gras mais pas tant que ça, juste ce qu'il faut!

La poudre:
Le mieux est de le faire dehors, dans sa baignoire ou dans sa douche!
Avec un gros pinceau, mèche à mèche, poudrer généreusement toute la mèche, devant, derrière, dessous, dessus, haut, bas! Il faut bien enduire la mèche, car l'amidon va absorber le gras! Peignez, seulement au peigne, pas à la brosse. Procédez pour toute la tête.
Et c'est là que la magie opère, même sur perruque!
Les cheveux deviennent légers, aériens, volumineux et doux!Ils prennent une jolie teinte un peu plus claire mais pas tant que ça.




LBCC Historical, une boutique qui refait des cosmétiques anciens (d'après des recettes d'époque ou adaptées) et les vends sur etsy,  fait souvent de très bonnes vidéos sur comment appliquer les produits qu'elle vend.

Elle a récemment fait des vidéos sur le même thème que ce billet. C'est en anglais et comme elle parle vite, vous ne comprendrez peut-être pas tout, mais au moins vous verrez sa technique et le résultat:


Je vous conseille vivement de regarder ses autres vidéos!

Vous voilà prêt(e) pour vous coiffez!

Petit bonus:

Un petit truc pour former le pouf ou le tapé sur le haut du crâne: avec des mèches d'extension que vous aurez crêpées ou du crin ou un donut à chignon (coupé pour en faire un boudin), enroulez la partie des cheveux qui part du haut de chaque oreille et qui passe au dessus du front et épinglez à l'arrière, comme ici:

Finalement, mon tapé fait avec un donut coupé était trop haut, je l'ai refait avec juste des mèches d'extension crêpées.