dimanche 26 juin 2016

Le manteau de robe éclair

...ou comment faire une robe en déshabillé d'été 1685 en deux semaines tout en travaillant.

Pari tenu!



Le manteau et la jupe sont en coton imprimé à la planche en Inde, comme à l'époque. Le style de la robe date en conséquence juste d'avant la prohibition des "Indiennes" (1686); même si dans les faits, on pouvait malgré tout en trouver sur le marché parallèle. Le patron est en fait très similaire à une robe à la française: plis dans le dos et plis devant. Dans les premiers modèles, les plis n'étaient pas fixés, seulement retenus en forme à la taille par une ceinture. Les miens sont en partie cousus. Il est fermé par des rubans anciens, une agrafe à la taille et une ceinture.

La jupe, comme souvent à l'époque présente des rayures horizontales comme les manches.

La fontange est composée de toile de coton fortement amidonnée, de dentelle ancienne et rubans anciens. Les barbes ont été faites en assemblant de la dentelle ancienne. C'est grâce à une gravure que j'ai compris la façon dont elle était montée.
La bagnolette, que l'on voit souvent sur les gravures, en en taffetas de soie noire.
Presque tout est cousu à la main (à part quelques coutures verticales pour la jupe et le manteau).

Ci-dessous, gravures extraites du Recueil des modes de la cour de France, dessins de Jean Arnoult ou de Jean Dieu de Saint-Jean, 1686-88.




Illustration de bagnolette de soie noire.

Quelques photos de montage:
Epinglage des plis du dos. Les plis du dos ont été beaucoup plus compliqués car j'avais décidé de les draper directement sur le mannequin... Je ne suis pas encore complètement satisfaite, mais tant pis!


Fixation des plis du dos, à plat.

Finitions!
Au total, le manteau m'a demandé 4m de tissu, ce qui était un peu juste et 3m pour la jupe.



Le manteau a été retroussé, mais le devant était un peu mal mis sur la photo de face... :-/



Et maintenant... direction les années 1740-50!

dimanche 19 juin 2016

Grand habit de cour Louis XV, les photos

 Après l'article sur la réalisation, quelques photos en action et in situ!


La Galerie des glaces est bien pratique car elle permet de faire des photos face et dos! 

Habit paré masculin 1780-90 et grand habit de cour féminin 1745-55.

 
Hop, deux portraits qui permettent de mieux voir les bijoux: boucles d'oreille girandoles, nœuds en strass et roses fraîches (photo Thierry Liard à gauche).

Dépliage de la traîne de plus de trois mètres... (photo Thierry Liard)






Hop, un portrait en pied, fin de soirée!

lundi 6 juin 2016

Grand habit de cour Louis XV: la technique

Ca y est, les Fêtes Galantes sont déjà passées! J'ai réussi à terminer mon grand habit de cour juste à temps. Il y a quelques petits détails qu'il faut que je revoie mais grosso-modo, je suis assez contente du résultat.


Patron: corps de robe XVIIe de chez Nehelenia Pattern, revu un peu à ma sauce (décolleté, mancherons)
Techniques: autant que possible d'époque, assemblage et couture à la main, sauf les casiers des baleines piqués à la machine et les très grandes longueurs de la jupe et de la queue; les ourlet sont faits à la main.
Fournitures: un mélange coton lamé argent. Toile de coton forte triplée en coton gratté. Décor de dentelle ancienne et métalliques, ganse et pompons anciens métalliques. Baleines en rotin.

Une partie des fournitures et un premier test de baleinage en rotin.

Temps de réalisation: heu... je suis nulle à ce jeu là: dois-compter juste la couture ou les recherches également?
Poids: le grand corps pèse son petit poids à cause du baleinage complet en rotin.

Mon avis sur le baleinage en rotin: C'est la première fois que je l'utilise. Si j'ai eu un peu de mal à introduire mes baleines (j'avais fait des tunnels un peu petits!) au final, c'est effectivement très confortable à porter, même si je l'avais beaucoup serré. Le rotin fait que cela est très respirant et se moule au corps à la chaleur, même si je trouve que cela le fait moins qu'avec des baleines en plastique. C'est assez étonnant, j'ai trouvé que cela corsettait plus mais plus agréablement! En même temps, ayant des problèmes de dos, un corps baleiné me soutient bien lorsqu'il est bien taillé et que je l'ai bien mis.

 Procédé:

Je me suis basée le plus possible sur les instructions donnée dans l'Art du Tailleur publié par Garsault.
Le grand corps est monté selon les techniques de l'époque.


Il est composé de deux épaisseurs de toile forte, contenant un double baleinage en rotin. J'ai repassé à la vapeur chaque baleine déjà découpée afin de les aplatir et de légèrement des humidifier. J'ai passé dessus un bloc de cire d'abeille alors qu'elles étaient encore chaudes afin de les imperméabiliser et d'emprisonner dedans une très légère humidité. Après léger refroidissement, j'ai inséré les baleines dans les casiers. Le fait qu'elles étaient encore tièdes et donc souples a éviter d'avoir trop de casse. Les tunnels ont été piqués à la machine pour un gain de temps (c'est la seule concession moderne que je me suis octroyée). Contrairement à ce que j'avais annoncé, le grand corps est en fait entièrement baleiné. Mes baleines ayant un ôté plat, j'en ai même mis deux dans un casier sur deux, afin d'être certaine que cela ne casse pas!

Chaque pièce est baleinée et recouverte de coton (pas encore ici) avant d'être assemblées ensemble au point de bourdon.


J'ai ensuite recouvert chaque pièce d'un coton gratté doux et un peu pelucheux pour atténuer les traces des tunnels. J'ai terminé chaque pièce du grand corps séparément. Les basques sont doublées en cuir fin afin d'éviter le percement des baleines et de limiter les frottement douloureux sur les hanches.


Les basques doublées de cuir vues de l'extérieur et de l'intérieur; après la triplure en coton gratté et la pose du tissu extérieur sur celles-ci.

La pièce du devant est renforcée par trois baleines de dressage horizontales qui donne un forme arrondie au devant, et un busc en bois pour lui donner encore plus de rigidité et un devant bien plat.

La pièce de devant tient toute seule grâce au baleinage! :-)


Ensuite, j'ai assemblé chaque pièce au point de bourdon. Enfin, j'ai recouvert de mon tissu (un mélange de lamé et de coton trouvé chez Temps d'Elegance), en forme sur le mannequin afin de ne pas avoir trop de plis entre le passage du plat aux trois-dimensions.

Premier essai!

J'ai fait mes œillets à la main, sous une patte, avant le montage des pièces et de recouvrir de mon tissu.

J'ai recouvert le corps sur le mannequin: vive l'aiguille courbe!

Le grand corps est orné de petites manches dites mancherons dont la forme m'a été inspirée par le corsage de cour de Marie-Antoinette actuellement exposé au Musée Galliera. S'y rattachent des manches en mousseline de coton ornées de six rangs de dentelle amidonnée de plus de 10m de long. Les dentelles ont été cousues aux manches de voile de coton à plat, avant d'être elles-mêmes cousues au grand corps.
Un mancheron.
Pose du mancheron au point de bourdon et manche complète fermée par un ruban de taffetas, comme on le voit sur les portrait à la saignée du coude.

Les coutures du devant sont décorées d'un galon doré, de dentelle plissée dorée en coquille et d'une dentelle ancienne à l'encolure.



Une ganse souligne la taille pour des raisons techniques: elle sert en fait à soutenir la queue qui s'y agrafe.
La ganse posée au niveau de la taille.

Le grand corps a également deux agrafes au dos, afin de plaquer la jupe pour qu'elle ne remonte pas trop haut.

Deuxième essai!


Ma jupe est un grand rectangle classique.

La traîne a été faite selon les cotes exactes et le patron donné par Garsault pour une "taille ordinaire"de 2.5 aunes, c'est à dire plus de trois mètres!
J'avais prévu un retrousse-traine avec ganse et pompon comme il l'indique mais je ne l'avais pas placé comme mentionné, de façon délibérée car je n'avais pas compris comment il pouvait être efficace. J'ai depuis compris en regardant une gravure et je vais rectifier cela pour la prochaine fois!

Les photos portés dans l'article suivant! :-)



samedi 4 juin 2016

Comment faire une coiffure d'homme années 1780

Aujourd'hui, un tutoriel sur comment coiffer une perruque (ou sa tête si on a les cheveux longs) pour les hommes, selon une mode qui existait sous la fin du règne de Louis XVI. Cette coiffure est dite à la hérisson. Tout d'abord quelques images.


1780, Gallerie des Modes françaises et anglaises, 1785, Marguerite Gérard, Portrait d'un homme dans son atelier, Museum of Fine Arts Boston.

 1786, Vigneron d'après Labille-Guiard, Robespierre en tenue de député du Tiers-Etat, Château de Versailles, 1786, Magasin des Modes Nouvelles, 1787, Gallerie des Modes françaises et anglaises.

1788 Léopold Boilly, La Famille Gohin, Musée des Arts décoratifs.

1788 Journal des Luxus, und moden

La perruque que j'ai choisie est synthétique, avec un montage tulle sur le front, plus naturel. Tout d'abord, j'ai brossé à la brosse de sanglier pour enlever l'effet perruque.  Ensuite, j'ai pommadé la perruque.




Avant le démêlage initial, après, et après le pommadage.




1. Matériel

Une perruque, j'ai utilisé une "lace front", plus naturelle et en synthétique, plus résistante.
Des pinces et barrettes à chignon et plates.
Des élastiques à cheveux sans joints métalliques.
Une bassine ou un grand récipient.
De la pommade et de la poudre, recettes ici.
Un support à perruque.



2.Temps estimé

Deux fois 2h et temps de séchage (48h min).



3. La mise en plis

Pour la mise en plis, j'ai séparé la chevelure en deux. Toute la partie inférieure d'une ligne horizontale reliant le dessus d'une oreille à l'autre a été tressée pour des questions pratiques. J'ai ensuite effectué des "noeuds bantous" sur toute la partie supérieure. Pour se faire, prenez de toutes petites mèches (un demi doigt environ d'épaisseur), tortillez la mèche sur elle même pour qu'elle s'enroule sur elle même en mini chignon. Cela demande du temps, mais plus les mèches seront petites, plus vous aurez l'effet voulu. Fixez chaque mèche avec un élastique à cheveux (surtout pas de caoutchouc qui ne supportera pas la chaleur et et qui s’emmêlera aux cheveux). 

Mini-chignons dit noeuds bantous faits, partie basse tressée: prête pour l'eau chaude!


Une fois que chaque mèche est terminée, enlever la perruque de votre support et mettez la dans une bassine, une cuvette ou même le lavabo fermé. Par dessus, verser de l'eau tout juste frémissante, mais pas bouillante. Pas besoin d'y mettre toute la perruque, juste les parties que vous voulez mettre en forme. Ici, la tresse vous permettra de manœuvrer la perruque. Agitez doucement pour que l'eau chaude pénètre bien partout. Je laisse environ une minute dans l'eau. Sortez la perruque, égouttez bien pour ne pas vous brûlez. Posez la perruque sur une serviette éponge pliée en deux 5 min le temps qu'elle absorbe l'eau. Remettre ensuite sur le support pour qu'elle sèche. Prévoyez un temps de séchage suffisamment long, au moins deux jours, sinon l'opération sera à recommencer depuis le début! En général je fais ces opérations d'un weekend sur l'autre pour être certaine que cela soit bien sec.

Si vous coiffez vos propres cheveux, faites les nœuds bantous sur cheveux humides et laissez sécher une nuit au minimum avant de les dérouler.

Attention à ne pas vous brûler!


4. Le coiffage


Idéal à atteindre: l'amiral de Villeneuve. Ici les cheveux sur le haut de la tête sont assez courts mais le fait de les crêper les raccourci grandement.

Pour défaire chaque chignon, il faut procéder avec un geste inverse en détortillant afin d'avoir un  effet mousseux et vaporeux. Cela donne un  effet crépu. Démêler chaque mèche, poudrer et donnez un coup léger de peigne pour répartir la poudre, qui devrait adhérer facilement grâce à la pommade.

A gauche: nœuds défaits en hait, nœuds bantous, partie basse non traitées. On voit entre les deux un petit bouts du rouleau.

En fois que chaque mèche est poudrée, y compris en partie basse de la tête, on fixe la partie crépue avec des barrettes et pinces en peu en arrière du crâne. Fanny nous a expliqué comment utiliser les barrettes ici. Sous cette partie, isolez une portion horizontale de la chevelure en partant d'une oreille à l'autre. Avec formez un rouleau vers le haut que vous fixerez avec des pinces plates comme je vous l'avais illustré ici. 
Avec le reste des cheveux en partie basse, formez un catogan, une tresse ou mettez les dans une bourse.
Rajoutez de la poudre si vous voulez un effet plus poudré.

Voilà la résultat, porté aux Fêtes Galantes de Versailles le 30 mai dernier.

Photo de droite de Luc Morel, retaillée pour montrer le résultat. Original dans sa galerie ici.

Si vous n'avez pas le courage, Olympe de Bagatelle peut vous en coiffer une, selon l'effet que vous souhaitez: Décorum et Bagatelle.

Si vous êtes plus puriste et que vous voulez une perruque créée sur mesure selon les techniques d'époque avec des vrais cheveux, contactez Emmanuel B Courau.

A vos peignes!