jeudi 12 mars 2015

Les cosmétiques: les ingrédients


Encyclopédie Méthodique, Arts et métiers mécaniques de Jacques Lacombe, 1782-1791, Paris: Panckoucke, Tome 6, Art du Parfumeur.

Depuis quelques temps, je m'intéresse aux cosmétiques anciens et du XVIIIe principalement. J'ai d'abord essayer de recréer le look XVIIIe avec des produits modernes, puis j'ai lu le livre de Catherine Lanoe, La Poudre et le fard (paru en 2008, mais vous pouvez lire d'autres articles en cliquant ici ) puis le blog d'Elisa, Madame Isis' Toilette. Et puis j'ai commencé à faire mes propres cosmétiques pour la vie de tous les jours, y compris certains articles de maquillage.
Bref, j'ai eu envie de me lancer dans l'expérimentation des cosmétiques XVIIIe et pour ça, je suis repartie aux sources, les recueils de l'époque.


J'en ai retenu:

*Bourgeois, Louise. Recueil des secrets... auquel sont contenues ses plus rares experiences pour diverses maladies, principalement des femmes, avec leurs embellissemens, Paris : Jean Dehoury, 1653.

* Blégny, Nicolas de. Secrets concernant la beauté et la santé.  Paris : Laurent d'Houry et Veuve de Denis Nion, 1688-89. Tome 1 et 2

*Le parfumeur royal ou traité des parfums : des plus beaux secrets qui entrent dans leur composition A Paris: au Palais, chez Saugrain l'aîné, 1761.

* Buc'hoz, Pierre-Joseph. Toilette de flore ou essai sur les plantes et les fleurs qui peuvent servir d'ornement aux dames ,Paris : Valade, 1771.

* Fargeon , D. J.. L'Art du parfumeur, Paris : Delalain fils, 1801.

Tous ces ouvrages sont disponibles en ligne sur Gallica, ainsi que l'Encyclopédie Méthodique, Arts et métiers mécaniques de Jacques Lacombe, 1782-1791, Paris: Panckoucke et l'Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers. de Diderot et d'Alembert (1751-1765).


Je vais m'intéresser dans une série de billets tout d'abord au rouge, puis un peu au fard blanc et enfin aux cosmétiques pour les cheveux. J'ai décidé de faire une série de tests comparatifs des différentes recettes, mais j'y reviendrai plus tard.

Pour le moment, je vais me pencher sur les ingrédients et les substituts que j'ai décidé d'employer. J'ai dressé une liste d'ingrédients revenant souvent dans les recueils, j'en ai cherché les définitions dans les ouvrages de l'époque et dans la pharmacopée actuelle.

Alun de roche (en poudre) ou alun de potassium : décrit comme un sel cristallisable dans L'Encyclopédie Méthodique de Jacques Lacombe, 1781 est un sel double soluble dans l'eau. C'est un minéral présent naturellement dans diverses régions du monde, telles la Syrie et le Maroc autrefois. Il est très utilisé en teinture comme mordant, dans l'industrie du cuir mais également en cosmétique, pour ses qualités astringentes, antibactériennes et hémostatiques. Il peut être utilisé sur les aisselles humides comme déodorant ou après le rasage.
A ne pas confondre avec l'ammonium alun, synthétique et réputé nocif.
On le trouve facilement dans les pharmacies, magasins bio.

 Poudre d'alun.

Amande douce ou amère (huile): issue du fruit de l'amandier, l'amande amère est un poison en interne, je l'ai directement écartée pour ne retenir que l'huile d'amande douce. Très utilisée depuis l'Antiquité pour ces propriétés adoucissantes, hydratantes et anti-inflammatoires (elle est recommandée en cas d’eczéma, peau sèche et irritée), elle se trouve très facilement.

Beurre frais: oui oui, c'est bien du beurre de lait de vache. En tant que corps gras, il a les mêmes propriétés qu'une huile: nourrissant et émollient. J'hésite encore à utiliser du "vrai" beurre bio, de baratte ou du beurre de coco...


Blanc de baleine ou spermaceti ou sperme de baleine: substance huileuse issue de la tête du cachalot. 
Au-dessus de 30 °C, le spermaceti est liquide. Il se cristallise petit à petit jusqu'à 0 °C, d'abord en se troublant, puis en une masse à larges lames entre-croisées. Il était très utilisé en cosmétique, notamment pour les rouges à lèvres. Évidemment, il est hors de question de chercher à s'en procurer vue sa provenance (la chasse au cachalot a été interdite en 1982). Un substitut possible est l'ester  de jojoba  ou cetyl ester. Je ne sais pas si je vais acheter de la cire de jojoba ou utiliser de l'huile de coco (aussi solide à température ambiante), il faut que je vérifie les propriétés de chacune.

Pot Besançon ou Franche Comté XVIIIe s. Inscription : Blanc de Baleine
Photo Bzoura 2009
©


Cire d’abeille blanche: c'est une cire filtrée et purifiée, contrairement à la cire jaune. Egalement utilisée depuis l'Antiquité, elle permet de durcir les huiles et baumes. Elle rentre dans la composition du cérat de Gallien. Ses propriétés  filmogènes (c'est à dire laissant un film protecteur) en font un ingrédient très intéressant pour les lèvres. Elle est également utilisée pour faire des bougies.
Cire d'abeille blanche, en petites pastilles (plus facile à doser).

Eau de rose, de fleur d’oranger: ou encore hydrolat, ce sont des sous-produits issus de la distillation de plantes (ici des roses et de fleurs de l'oranger amer) pour extraire les huiles essentielles desdites plantes. En fait, c'est l'eau qui va servir à la distillation, elle est donc très légèrement chargée en molécules de ces essences. L'eau de rose et de fleur d'orange servent à la fois en cuisine et en cosmétique. L'eau de rose est rafraîchissante, adoucissante et a un effet légèrement tenseur, l'eau de fleur d'oranger est plus adapté pour les peaux sèches.

Fleur d'oranger et rose de damas.


Eau de vie: le Dictionnaire de l'Encyclopédie indique qu'il s'agit d'une liqueur forte tirée du vin par distillation ou de cidre. Etant donné que l'ont peut faire de l'eau de vie d'à peu près n'importe quoi, j'ai décidé de travaillé avec de l'alcool bio à 96°C.

Gomme d’adragante:elle est obtenue à partir de la sève d'Astragalus gummifer, un petit arbre poussant principalement en Iran, en Turquie et en Syrie. C'est un gélifiant naturel aussi utilisé en cuisine et dans l'industrie textile. Elle peut se présenter sous forme de "cristaux" ou de poudre (celle que j'ai acheté est en poudre).

Gomme adragante "brute".


Miel: produit par les abeilles, il est très bon pour la peau car c'est un très bon hydratant et protecteur. Il est antibactérien et cicatrisant. Je l'utilise déjà dans mes cosmétiques de la vie de tous les jours (et en pâtisserie!).

Myrrhe: une gomme-résine aromatique produite par l'Arbre à myrrhe (c'est sa sève séchée). Elle est utilisée depuis la haute antiquité pour de nombreuses propriétés (cicatrisante, antiparasitaire, antivirale, anti inflammatoire) et elle est utilisée comme de l'encens pour sa bonne odeur. Elle était à la fois utilisée dans les cosmétiques et les parfums. Elle n'est pas sensée être soluble dans l'huile (ni dans l'eau), mais on va tester avec les recettes!
Encyclopédie Méthodique, Arts et métiers mécaniques de Jacques Lacombe, 1782-1791, Paris: Panckoucke, Tome 6, Art du Parfumeur.

La résine de myrrhe que j'ai achetée.


Talc: est une espèce minérale composée de silicate de magnésium. Il est utilisé dans de nombreux domaines. Très utilisé en cosmétique comme support ou pour éviter les échauffements, la transpiration. J'ai acheté un talc spécialement conçu pour les cosmétiques.
 
Vin rouge: c'est un alcool, entre autres, plein de tanins (donc colorants et anti-oxydant) et de polyphénols également anti-oxydants qui  améliorent la micro-circulation cutanée et ont un effet apaisant. Il a un effet anti-microbien.


Vinaigre : c'est un liquide acide, obtenu à partir de différents alcools (vin, cidre, alcool distillé). Grâce à ses qualités antiseptiques, le vinaigre était utilisé pour "purifier" l'eau et se laver avec un linge, de la façon dont on pratiquerait une toilette de chat aujourd'hui. Le vinaigre (de différentes plantes) peut être utilisé pour se laver le visage, se rincer les cheveux pour refermer les écailles, les rendre brillants, traiter le cuir chevelu et rétablir le PH.