Pour les
Fêtes Galantes organisées au Château de Versailles, j’ai décidé de me faire un grand habit de cour. Temps d’Elegance a posé les bases dans
un de ses articles et va vous présenter des tutoriels avant cet événement, afin vous aussi de réaliser un grand habit de cour. Je vais détailler ici mes recherches personnelles, j’espère qu’elles vous seront utiles !
Mon tissu sera un lamé argent. Les décors en dentelle et dentelle métallique.
J’ai décidé de me tourner vers un habit de la période Louis XV, des années 1745-55. Mes principaux modèles sont les portraits des filles de Louis XV et Marie Leczinska.
1748 : Nattier Mesdames Victoire et Sophie de France, 1749, Nattier, Madame Adélaïde de France.
Le grand corps a en fait une coupe très « archaïque » puisqu’elle reprend celle des grands corps de l’époque de Louis XIV.
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Illustration d’un grand habit de cour donnée par Garsault dans l’Art du tailleur, 1769.
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Voici la définition qu’en donne Garsault : « le grand habit de cour consiste en un corps fermé, plein de baleines, & un bas de robe : le corps se couvre d’étoffe ; le bas de robe se fait des mêmes étoffes, ainsi que le jupon ; Le Tailleur de corps construit le corps & le bas de robe ; la Couturière, le jupon; la Marchande des modes ajoute à l’habillement les pompons &; agréments. » « Cet habit est ancien, & n’a pas changé jusqu’à présent pour les cérémonies de la cour. »
Si l’explication et assez claire, je dois avouer que je suis un peu sceptique face au dessin donné par Garsault.
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Grand corps pour grand habit de cour, Garsault, l'Art du Tailleur, 1769 |
Il indique la forme générale, avec des bretelles (ou épaulettes) placées très basses dégagent le haut des épaules, comme sur les portraits mais je suis plus gênée par le nombre de pièces constituant le corps. Ils semblent plutôt composés de cinq pièces (ou 7 si les épaulettes sont séparées), les coutures recouvertes de décorations (dentelle, ruchés ou broderies). Le modèle de Garsault semble présenter une seule couture sur le côté au lieu d’en avoir une en plus sur le côté devant. Les quelques pièces survivantes de grand habit à la française survivantes sont également composées de plus de pièces.
Quoiqu’il en soit, j’ai décidé de plutôt me baser sur les portraits d’époque en ce qui concerne le nombre de pièces. Je ne sais pas encore si je vais reprendre le patron de ma robe de cour XVIIe siècle en adaptant un peu les mesures car je trouve l’encolure pas encore super ou si je reprends mon patron de corps baleiné qui me vas très bien et pour lequel je n’ai eu aucune modification à faire (issu du Costume close-up de Linda Baumgarten). Mais je devrais beaucoup plus le modifier.
Pour le baleinage, j’ai découvert que je corsettais tout aussi bien avec un corps semi baleiné plutôt qu’avec un corps pleinement baleiné. En fait, le pleinement baleiné n’affine pas plus mon torse et donne une légère épaisseur en plus. Quand j’écris « semi-baleiné », je baleine le devant complètement, ainsi que le dos, seuls les côtés sont un peu allégés. Il s'agirait plutôt d'un "trois-quart"! Je pense me baser sur la radiographie du corsage du mariage de Sofia Magdalena (1772) pour le sens des baleines. Je vais peut-être y ajouter une poche à busc, pour avoir un devant bien droit, étant donné que les baleines ont tendance à suivre les courbes du corps avec la chaleur du corps.
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Radiographie du corsage du grand habit de cour se Sofia Magdalena, 1772, repique depuis Isis' wardrobe. |
Egalement repiqué chez Isis' wardrobe, un autre corps piqué, des années 1770-90. On devine que même les petites manches sont baleinées. Le nombre de pièces est identique à ce que l'on voit sur les portraits. La fermeture se fait au dos, mais n'est pas visible car les oeillets sont cachés par un petit rabat de tissu. Il y a un busc très mince sur le devant en plus du baleinage, qui présente aussi des "baleines de dressage": des baleines horizontales qui soutiennent la poitrine.
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Grand corps, XVIIIe siècle, Metropolitan Museum.
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Grand corps de 1772 et corset porté sur un grand corps piqué, pour Marie Antoinette, années 1780. |
On note la présence de crochets au dos, afin de maintenir bien à plat la jupe et le bas de robe.
Petite analyse de la composition du grand corps :
J'ai délibéré coupé les images pour se focaliser sur les grands corps.
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1745-1756 |
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1749-1754 |
1. Manches garnies de dentelles dites "petits bonhommes": un ou deux volants tombants depuis le haut, et deux montants depuis le coude. On voit parfois un autre volant dessous, qui peut provenir de la chemise. Les manches peuvent être amovibles (comme sur la première photo, robe de mariage de la future Catherine II de Russie) ou cousues au grand corps ou à la chemise.
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Grand corps à la française du couronnement de Maria Feodorovna, 1796, Musée des Armures, Moscou. |
2. Bande de dentelle droite cousue au décolleté. Quelques plis permettent d'épouser la courbure du corsage.
3. Décoration du devant: il peut être fait de "coquilles"de dentelles, plus rarement de broderies et surtout de bijoux!
4. Épaulettes basses, se plaçant sur l'épaule.
5. Devant du corsage pointu et descendant assez bas. C'est le seul endroit où l'on peut éventuellement voir deux ou quatre petites basques ou tassettes. Sur les portraits, on a une forme assez arrondie sur le devant, comme sur le dessin de Garsault, mais toutefois la taille est très fine. Cela me semble aujourd'hui anatomiquement impossible à obtenir sans avoir un corps déjà formé depuis l'enfance à porter ce genre de forme de corps baleiné. Donc on va tricher!
6. Ruban fermant le bas de la manche (c'est mon interprétation!).