jeudi 23 avril 2020

La Mode Illustrée: cours de coupe et de couture 1905

Aujourd’hui, je commence une nouvelle série d’articles pratiques. Tout sera tiré de la fameuse revue La Mode Illustrée. "sous l’impulsion de sa rédactrice en chef Emmeline Raymond, tente dès les premiers numéros d’aider les femmes dans tous les aspects de leur vie domestique, familiale, sociale.
Créée en 1860, la revue s’adresse principalement à une clientèle bourgeoise et se pose en véritable guide du bon ton et de l’élégance parisienne. Emmeline Raymond a su imposer La Mode illustrée comme une revue emblématique et avant-gardiste de la presse féminine du XIXème siècle."
Je tiens à remercier grandement la bibliothèque du Musées des Arts Décoratifs pour avoir mis tous les numéros en ligne. Cette publication est complétée par le Musée Galliéra, qui a mis en ligne quelques patrons de la même revue. 

Cette revue est très célèbre car elle propose donc des patrons, mais j’ai décidé de mettre en lumière également les articles, qui sont à mon avis trop peu utilisés. Le gros défaut de ces articles est d’être éparpillé sur plusieurs numéros, parfois non consécutifs, et noyés dans les illustrations qui n’ont pas forcément de rapport avec l’article en question. J’ai donc décidé de travailler un peu pour vous et de trier tout ça. 

On commence par le début : un cours de coupe, paru en 1905. Il s’étale originellement sur neuf numéros ! Il va comprendre 3 parties : une introduction ici même, un cours sur le corsage et enfin sur une jupe à trois plis religieuses. Il ont été rédigés par M. Valleray.
Je pense –et espère- répondre ainsi à des questions que se posent ceux et celles qui voudraient coudre à la façon de la Belle Epoque. 

Je ne fais que recopier [sauf italique pour mes réflexions ou mise en gras quand je veux souligner un détail important], afin de garder la succulence du texte original. De plus, vous pourrez utiliser le traducteur google en haut à droite ! 

Je vous conseille de lire un cours en entier avant de commencer.

Cours de coupe et de couture



 Ce n’est pas tout d’avoir un patron à sa taille, il faut savoir s’en servi ; et cette science repose sur certaines données précises auxquelles ne saurait suppléer la meilleur volonté. La confection d’un corsage ou d’une jupe comporte plus de mille et un détails qui embarrassent et découragent souvent les débutantes. 
« Nous n’avons pas fait d’apprentissage- nous écrit une de nos abonnées- et nous ne savons pas dans quel sens poser nos patrons sur l’étoffe ! L’essayage nous embarrasse encore d’avantage : à quelle couture et de quel côté devons-nous reprendre l’étoffe pour faire des rectifications nécessaires ? Quel est le meilleur mode de fermeture ? Comment une jupe ou les manches d’un corsage ? » etc. 
C’est pour répondre à ce désir exprimé par plusieurs, que nous commençons aujourd’hui une série d’articles ayant trait au vêtement fait à la maison. Nos explications porteront tout d’abord sur la manière d’établir un corsage en doublure ; et pour le dessus, qu’on applique ensuite, nous choisirons ensuite dans le journal un joli modèle type, assez facile à reproduire pour que les plus novices puissent en mener à bien l’exécution. 

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 Le premier point à observer est d’avoir un patron à sa taille. Voici le tableau des mesures qui se rapportent aux différentes tailles de mannequins sur lesquelles nous établissons les nôtres. 

Tableau des tailles utilisées par La Mode Illustrée en 1905
 A noter que La Mode Illustrée utilise surtout la taille 46 (66 cm de tour de taille, 96cm de tour de poitrine). Quand la revue propose des "tailles fortes", il s'agit plutôt de la taille 48 (72 cm ou 74 cm de tour de taille, 108 ou 110cm de tour de poitrine). A noter qu'il y a une erreur sur le tour de poitrine du 44: lire 92cm et non pas 98cm!

La mesure du tour de taille se prend sur la robe en serrant un peu ; pour celle du tour de poitrine on entoure le buste du mètre ruban, qu’on fait passer sous les omoplates, puis sous les bras, et qu’on ramène ensuite devant au plus fort de la poitrine. Le tour des hanches est pris au plus fort de la hanche, c’est-à-dire 10 ou 12 cm au-dessous de la taille.

Voyez, d'après ces indications, à quel numéro de mannequin correspondent approximativement vos mesures, et nous expliquerons par la suite les rectifications à faire aux patrons. Mais si la différence est par trop sensible entre vos mesures personnelles et celles énoncées plus haut, vous ne devez pas hésiter, -pour un début surtout- à nous demander un patron sur mesures exactes [et ben tiens! La Mode Illustrée en plus de proposer des patrons taille mannequin, proposait aussi un service de patrons à vos mesures, service payant bien entendu!] malgré la petite augmentation de prix qu'il comporte.
Le mannequin 44 est la taille la plus courante et permets encore de couper les devants d'une seule pièce. [à cette époque, les largeurs des lés de tissu sont moins larges: entre 90 et 110 cm ] Mais pour certaines tailles correspondant aux N° 46 et 48, il est quelques fois indispensable de couper les devants en deux pièces,  surtout pour les costumes-tailleur. Nous reviendrons plus tard sur ce point, s'il en est besoin.

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Il faut, pour un corsage, environ deux mètres de doublure; 1m75 à 1m80 peuvent néanmoins suffirent pour les tailles 40 et 42, mais nous disons 2m, pour le cas où l'on ferait une erreur, bien excusable de la part des débutantes. La doublure doit avoir un envers noir ou bleu si elle destinée à un corsage foncé, semblable au dessus pour tous les corsages clairs.[Ceci dit, il existe des doublures claires ou de couleur vive pour des corsages en dentelle foncée]
Pliez-la en deux, en suivant bien le droit-fil, dans le sens de la longueur, étendez-la de cette façon sur une planche ou une table qui ne craigne rien. Disposez sur cette doublure les différents patrons, dans la position qu'ils occupent sur la Planche I et chaque patrons se trouvera ainsi coupé en double.

Disposition des pièces de patron pour couper une doublure La Mode Illustrée 1905
 Le bord du devant (1) à partir du milieu de la poitrine jusqu'en bas, suit la lisère de l'étoffe à  ou 4 cm plus loin; de même le bord extérieur du dessus de la manche (5) depuis l'emmanchure jusqu'au coude. Il est indispensable que pour les pièces 2 et 3 du dos et la pièce 4 du petit côté du dessous de bras, la ligne de taille, indiquée par un pointillé, suive exactement le droit fil du travers de l'étoffe [c'est à dire une ligne de trame].
On fixe les patrons sur les doubles de doublure par quelques épingles, ou mieux, pour les commençantes, par de grands points de bâtis. On suit alors tous les contours avec une roulette à patrons en appuyant assez fortement, pour que les petites dents de la molette pénètrent bien dans les doubles d'étoffe. C'est pourquoi nous avons fait placer celles-ci sur une table ne craignant rien.
Eviter de rapprocher les patrons plus qu'ils ne le sont sur le planche I, car il faut, en taillant, laisser 2 cm sur chaque contour [la valeur couture!], et même 3 ou 4 à l'emmanchure, à l'encolure et aux coutures d'épaule et du dessous de bras, c'est à dire aux endroits marqués X sur la planche. Il ne faut pas couper les pinces.


La suite au prochain épisode, sur le corsage!

Source: La Mode Illustrée, gallica.bnf.fr / BnF

2 commentaires:

Mademoiselle Cotillons a dit…

Diantre, 66 de tour de taille... Bien corsetée, je peux. Pas longtemps, mais je peux! Merci pour cet article, c'est très très intéressant!

Élisabeth a dit…

Le tour de taille, c’est ce qu’il y a de plus facile à modifier...